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Pleurer comme une femme

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C'était un samedi de février. On nous avait prédit de la pluie torrentielle pour 48h.
Et ce matin là, cours de danse annulé, un beau soleil au milieu des nuages gris : enfourchons nos vélos ! On est tous un peu fatigués, on ira pas loin. Juste le plaisir de prendre l'air ensemble.
Nous roulons donc tous les 3, deux adultes et une petite fille de 4 ans en plein apprentissage du vélo à pédales et sans roulette, sur les Rives de Saône. Interdites au vélo.
Nous le faisons tout le temps. Car Gabrielle est trop petite pour rouler sur la piste cyclable intermittente/dangereuse du quai, au milieu des voitures. La vue est plus agréable au bord de l'eau quand tu n'as pas le nez à hauteur des pots d'échappements. On nous fait assez peu souvent la remarque car nous sommes toujours respectueux des gens que l'on croise à pied, ou... à vélo.

A un moment donné, il y a beaucoup de joggers dans les deux sens. Gabrielle est fatiguée et est à l'arrêt sur un passage pas très large. J'attends sur le bord. Ma fille et mon chéri sont 2 mètres derrière moi. Un jogger me dépasse. Sans se retourner, il dit, "Madame, c'est pour ça que c'est interdit aux vélos ici."
Je réponds du tac au tac "oui, c'est vrai que nous, on serait bien mieux à rouler dans les gaz d'échappements."
Dans sa foulée et toujours sans se retourner, il me crie " t'as qu'à plutôt rouler dans l'eau, casse-moi pas les couilles".
Je reste interloquée. KO. Quelques secondes suspendues entre silence et solitude.
Je raconte la scène à mon chéri, et je fonds en larmes.
Je reste prostrée dans mes pensées de femme insultée pendant au moins quart d'heure.
Envie de rentrer chez moi, la gorge nouée.
Les larmes roulent sur mes joues. Le soleil a disparu, le ciel gris.
Injustice. Je pense à cette phrase qu'il a bien sûr choisi de me dire à moi, pas à mon chéri.
Culpabilité. J'aurais dû me taire en fait.
Dégoût. Je pense à cette violence dans les mots. Si familière, si lointaine à la fois.
25 ans que j'ai pas subi ça.
Résignation. Je pense à son âge (jeune, 25/30 ans) et au monde peuplé de sombres connards comme lui, avec qui il va bien falloir composer.
Mépris. Je pense aux femmes qui ont eu la grande chance de coucher avec lui.
Peur. Je pense à la possibilité de le recroiser, s'il fait demi-tour dans son parcours.
Découragement. Je pense au féminisme et à ce putain de combat qu'ici en France en 2017 on est encore obligée de mener pour se faire respecter.
Honte. Je prie pour que ma fille n'ait rien vu, rien entendu, rien compris de ces larmes qui coulent encore en écrivant ces quelques mots.
Espoir. Doucement, je commence à regarder le paysage. A trouver du beau autour de moi.
Force. Il ne me volera pas, ce moment qui n'appartient qu'à nous, cette balade imprévue, cet itinéraire qu'on aime tant.
2 commentaires on "Pleurer comme une femme"
  1. Ton post sur la mechancete gratuite dont nous sommes victimes au quotidien resonne... ainsi que sa reciproque.
    Le weekend dernier (alors que nous etions d'humeur un peu morose - un "weekend vacances" a la neige ayant ete annule pour cause d'avalanche de rhume/ rhinite/ otite), nous descendions tranquillement l'avenue pour aller sur le marche et son parc adjacent. C'est alors que nous avons croise le chemin d'un vieil homme qui nous a adresse la parole pour nous dire de profiter de notre petite blondinette de 2.5 ans, que ces moments simples sont tellement precieux.
    Il nous a avoue avoir 80 ans (alors qu'il en faisait a peine 65 - vive le regime mediterraneen!) et qu'a l'epoque, il descendait de Gairaut (commune des collines nicoises) a velo et que, a l'epoque, les gens etaient bienveillants les uns envers les autres.
    Et avec des quelques mots, il a eclaire notre weekend...
    Apres mure reflexion, il a trouve le mot juste: la bienveillance, voila la cle du "vivre-ensemble".
    Bien a toi...

    Ps: desolee pour les accents, absents de mon clavier QWERTY...

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  2. Ça m'a fait bizarre de te lire car j'aurais eu exactement la même réaction que toi. J'aurais été choqué. Notre sensibilité a ce monde parfois très dur n'est pas facile à gérer. Il faut composer et essayer de garder les bonnes expériences et oublier celles qui ne nous apportent rien et même nous attristent.
    je t'embrasse très fort ainsi que tes 2 amours

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